Paris, 12 mars 2019 - Sotheby’s a l’honneur de dévoiler la collection d’art africain de Marceau Rivière, grand défenseur des arts d’Afrique, expert et marchand, mais, avant tout, éminent historien de l’art. Pendant plus de 50 ans, cet homme discret a réuni plusieurs centaines d’oeuvres que Sotheby’s mettra en vente le 19 juin à Paris.
Selon Alexis Maggiar, directeur Europe pour le département des arts d’Afrique et d’Océanie, Sotheby’s : « Lorsque que Marceau Rivière me fit l’honneur d’ouvrir les portes de son appartement il y a quelques années, la découverte fut sidérante. Sa collection, préservée à l’abri des regards depuis plus d’un demi-siècle, s’est d’emblée imposée à mes yeux comme l’une des plus remarquables et des plus complètes en art d’Afrique. Une collection guidée sa vie durant par la beauté, la passion et la connaissance que nous sommes particulièrement honorés de défendre chez Sotheby’s. »
Si Marceau Rivière est l’un des plus importants collectionneurs dans ce domaine, il s’affirme par sa formation et son approche d’historien de l’art, ayant consacré une part majeure de son parcours à la recherche et à l’écriture. Ses livres ont ainsi contribué à faire redécouvrir un grand nombre d’artistes, en particulier ceux de Côte d’Ivoire. Pendant plus de cinquante ans, Marceau Rivière sera l’un des plus fervents défenseurs de l’art africain ; un art qu’il n’a eu de cesse de mettre sur le devant de la scène et de transmettre au plus grand nombre.
Exceptionnelles aussi sont son approche instinctive des oeuvres d’art et sa sensibilité artistique qui ont présidé à la constitution de sa collection privée.
Sa fascination pour l’Afrique naît dès l’enfance, lors de la projection d’un film sur le Congo par un missionnaire de passage dans sa région, et ne le quittera plus jamais. Sa collection débute dès son plus jeune âge. Il achète son premier masque à l’âge de onze ans – objet qu’il a toujours conservé. En 1957, il est incorporé comme méhariste en Algérie et débute ses premières missions pour le musée national du Bardo d’Alger. A partir de 1961, démobilisé, il intègre la compagnie UTA comme ingénieur-technicien. Son nouveau métier lui permet de vivre en Afrique et, en particulier au Tchad, berceau de la civilisation Sao. Pendant plus de vingt ans, sa profession le fait voyager sur tout le continent africain, nouant partout des relations amicales avec les chefs de villages dont il étudie sur place les arts et les coutumes. C’est à cette époque qu’il constitue les prémices de la vaste et riche collection qui existe aujourd’hui. En 1975, il écrit son premier livre sur Les Chefs-d’oeuvre africains des collections privées françaises, qui dès sa publication lui confère une réputation internationale et sera traduit en anglais et allemand. De nombreux ouvrages de références suivront.
Il rencontre aussi les collectionneurs européens résidant sur place : Paul Delcourt, André Blandin, Maître Loiseau, Philippe Guimiot et Jacques Kerchache, Pierre Dartevelle, Alain Dufour. Son réseau prend rapidement de l’ampleur et, dès les années 1970, il commerce avec les plus renommés collectionneurs et les marchands.
Ses amis sont tous de grands collectionneurs ou défenseurs de l’Art Africain au premier rang desquels Merton Simpson, Maurice Nicaud, Samir Borro, Willy Mestach, Robert Duperrier, Henri Kamer et René Rasmussen.
Après avoir quitté l’aviation, il se consacre entièrement à sa passion. Il enrichit sa collection en achetant, auprès de ses confrères marchands et en ventes publiques, des oeuvres aux provenances prestigieuses issues des collections Vérité, Rubinstein, Guillaume ou Ratton. En 1981, il ouvre à Paris rue Saint-Benoit, la galerie Sao en souvenir de son séjour au Tchad, lieu de rendez-vous des amateurs du monde entier. Aux chefs-d’oeuvre des arts de Côte d’Ivoire - Baulé, Dan et Guro - qui en constituent la trame répondent des icônes de l’art Fang, Kota, Kongo et bien d’autres encore. Chacune de ces pièces témoigne du génie individuel de leurs sculpteurs et des institutions qui nourrirent leur imaginaire, et conte également l’histoire de leur découverte par l’Occident, au début du XXe siècle.
Cette collection exhaustive sur les arts d’Afrique s’impose comme l’une des toutes dernières historiques dans ce domaine, et témoigne d’une vie de passion dévouée à l’Afrique et ses trésors.
CUILLERE, DAN, CÔTE D'IVOIRE

Haut. 52 cm
PROVENANCE:
Olivier Le Corneur (1906-1991), Paris
Collection Jean-Marie Talleux, Grand-Fort-Philippe
Collection Marceau Rivière, Paris, acquis ca. 1983
OEuvre majeure de l’art Dan, cette cuillère anthropomorphe s'impose comme le chef-d’oeuvre d’un ensemble déjà célébré pour ses proportions imposantes et son inventivité formelle. Insigne de dignité, elle personnifie la beauté féminine, traduisant à la perfection les critères fondamentaux de l'esthétique des Dan, à la fois dans les formes et dans le soin apporté à la parure. Transcendant les caractéristiques classiques du corpus, l’artiste est ici parvenu à atteindre l’équilibre parfait du rapport formel entre oeuvre et objet, entre
statuaire et réceptacle.
MASQUE, BAULÉ, CÔTE D'IVOIRE

Haut. 22,5 cm.
PROVENANCE:
Collection Marceau Rivière, Paris, acquis ca. 1972
Symbole métaphorique de la « lune », ce masque rond s’inscrit dans un corpus rarissime d’oeuvres apparaissant à l’ouverture des cérémonies Baulé. Paroxysme de l’abstraction de la figure humaine, le visage
s’inscrit dans un cercle parfait auquel répondent, en écho, les demi-cercles de la coiffure, des sourcils et des yeux dans un modelé parfaitement équilibré. D’une pureté absolue, ce masque illustre le génie individuel d’un artiste qui a su puiser dans le répertoire traditionnel de l’art Baulé pour créer un chef-d’oeuvre intemporel.
FIGURE DE RELIQUAIRE, KOTA MAHONGWE, GABON

Haut. 39 cm
PROVENANCE:
Vente Loudmer
Merton Simpson (1928-2013), New York
Collection Marceau Rivière, Paris, acquis en 1990
« Les Kota-Mahongwe ont poussé à l’extrême les principes
sculpturaux de leurs voisins Kota. L’abstraction de leurs figures
funéraires est tout à fait prodigieuse » (Perrois in Arts d’Afrique Noire,
n° 20, 1976, p. 36).
Dans cette oeuvre, l’artiste est parvenu par une admirable virtuosité à imposer la majestueuse présence de l'ancêtre. A travers un exercice de maîtrise des formes et de la matière, son génie s’illustre dans la tension harmonieuse des courbes, accentuée par le mouvement des fines lamelles de laiton et, au dos, dans l'élaboration abstraite du décor, individualisant l'ancêtre et accordant à l’effigie un surplus de valeur symbolique.
MASQUE, GURO, CÔTE D'IVOIRE

Haut. 29,5 cm
PROVENANCE:
Collection Marceau Rivière, Paris, acquis ca. 1978
Pièce majeure au sein de son corpus, ce masque illustre superbement l'essentielle expression de la perfection placée au coeur de l'art Guro. L’éloquente beauté unissant les critères de l’esthétique Guro se traduit ici de façon intense : étroit visage au haut front bombé, coiffure complexe dessinant sur le front un motif au contour dentelé en arabesque, arrête étroite du nez exaltée par le sensible jeu de lignes tendues vers la bouche ouverte, aux dents délicatement taillée. S’ajoutent les scarifications qui signifiait le haut rang de la figure représentée et renforcent sa beauté incomparable.
STATUE, BAULÉ, CÔTE D'IVOIRE

Haut. 49 cm
PROVENANCE:
Collection Paul Guillaume (1891-1934), Paris
Robert Duperrier, Paris
Collection Marceau Rivière, Paris, acquis ca. 1979
S’affranchissant des canons classiques de l’art Baulé, cette statue affirme l’individualité artistique de son créateur qui a su sculpter une oeuvre d’une intense sensibilité. Arborant une longue barbe, signe de son statut élevé, l’homme représenté impose une impression de sérénité et d’apaisement. Le raffinement de la sculpture est ici sublimé par une profonde patine, signe d’un grand archaïsme.
STATUE, ZANDE, RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Haut. 26,5 cm
PROVENANCE:
Collection privée, France
Ader-Picard-Tajan, Paris, 2 décembre 1981,n° 201
Collection Marceau Rivière, Paris, acquis lors de cette vente
Emblème de la société mani, les statues Zande expriment un équilibre parfait entre figuration humaine et abstraction, équilibre qui atteint ici son paroxysme. La remarquable géométrisation du corps transcende la structure plastique bien articulée et d’une pureté absolue. S’ajoute la profonde patine crouteuse et les anneaux de laiton, témoins de nombreux hommages rendus à cette statue.
LE CATALOGUE DE VENTE
Le catalogue de la vente de la collection Marceau Rivière sera un ouvrage de référence dans
lequel plusieurs spécialistes, marchands, conservateurs internationaux reconnus rédigeront
des textes selon leur spécialité, parmi lesquels Daniel Hourdé qui écrira l’introduction.
UNE COLLECTION AUX PROVENANCES ICONIQUES
- Paul Guillaume, Paris
- Helena Rubinstein, New York
- Armand Arman, Paris
- Baron Lambert, Bruxelles
- Hans Himmelheber, Heidelberg
- Merton D. Simpson, New York
- Charles Ratton, Paris
BIBLIOGRAPHIE MARCEAU RIVIERE
- Marceau Rivière, Les chefs-d’oeuvre africains des collections privées française, 1975
- Marceau Rivière, Exposition d’Art Africain, 1979,
- Marceau Rivière, Masques d'Afrique, 1986
- Marceau Rivière et Raoul Lehuard, Art Africain, 1991
- Marceau Rivière, Arts Ancestraux du Cameroun, 1995
- Alain-Michel Boyer, Patrick Girard et Marceau Rivière, Arts premiers de Côte d'Ivoire, 1997
- Joubert, Marc L. Félix et Marceau Rivière, Image de la Femme dans l'Art Africain, 2000
- Hélène Joubert et Marceau Rivière, Masques d'Afrique, 2010